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6 rue du chêne
04:19
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C’est au 6 rue du chêne que commence notre voyage
Dans cette maison en bois faisant face à l’église
Laissons le portillon, longeons la route grise
Suivez-moi, entrons par le garage
Quand la serrure têtue se décide à céder
On y trouve fraîcheur et montagne de bois
Mais remarquez plutôt la hauteur de son toit
Il parait qu’on pourrait y stocker un voilier
Prenons la petite porte menant au cagibi
Une brave chaudière besogne malgré l’usure
Trois étagères dégueulent un trop-plein de chaussures
Et toute cette collection d’objets endormis
Entrons dans la maison, sentez-vous cette odeur ?
C’est l’empreinte olfactive du lieu, des habitants
Vous savez ce parfum unique et rassurant
Que nous ne remarquons qu’en tant que visiteurs
Nous voici dans le hall, la porte d’entrée ouverte
Une lavande timide craint de se faire couper
On aperçoit une clochette pour se faire annoncer
Mais seul le vent s’amuse avec cette sonnette
Continuons notre parcours
Ici, la cuisine, mais ne nous attardons pas
Peu de prouesses culinaires sont à observer là
Seule l’horloge en forme de poêle vaut le détour
Le salon, la bibliothèque grandiose
Le piano, vieilli, un peu désaccordé
Tente tant bien que mal de rivaliser
Avec une flûte traversière toujours plus virtuose
Jusqu’au premier étage, prenons l’escalier
Ici, une mezzanine cache de ses trésors
De robes, de costumes, de tentures, de décors…
Sur sa moquette rose, laissez-vous « théâtrer »
Dans la Véranda si vous regardez bien
Vous verrez trois Korrigans dans leur souche de bois
Trois conteurs muets. Ah et ne dérangeons pas
La libre procession d’un couple de lapins
D’ici, l’immense jardin vous pouvez le voir
La glycine éclatante et deux saules pleureurs
L’un grand, l’autre petit, pourtant planté à la même heure
Et tout au fond le souvenir d’une balançoire
Enfin, je vous laisse monter au grenier
Pour aller découvrir un univers de livres
En grec ou en latin, bibliques ou bien païens
Voici l’antre érudit des mots et du papier
Et après avoir enjambé la poutre, mes amis
Je vous présente la mémoire vive du lieu
Les anciens jouets, les vêtements miteux
Qui se souviennent sans cesse de ce que l’on oublie
C’est ici que s’achève notre visite partagée
Bien d’autres pièces vous resteront secrètes
J’aurais pu vous en montrer davantage certes,
Vous dire dans la cuisine l’imposante cheminée
Vous raconter aussi l’histoire de la propriété,
Le puits dans le salon scellé sous le carrelage
Et les danses en son sein, les fêtes de village
Des voisins qui virent ici leur couple se former
Mais ici s’achève la visite de la demeure
Ayant vu mon enfance se bâtir doucement
Et si j’y retourne toujours accueillie tendrement
Je m’y sens de passage, comme vous visiteurs
Même si je la connais par cœur au fond je le sais
Même si c’est attristant, je ne suis plus chez moi
Mais si la vie un jour m’offre une maison en bois
J’espère que ses fondations en seront inspirées
Du garage au grenier.
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2. |
Si j'étais je serais
02:32
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Si j’étais une fleur de jardin
Je serais glycine à épines
Traçant patiemment ses chemins
Sur les murs d’une maison en ruine
Si j’étais un moment du jour
Je serais « coucher de sommeil »
Quand les ciels de bleu se font lourds
Comme un chef-d’œuvre accidentel
Si j’étais parfum ou odeur
Je serais une forêt endormie
Douce mais folle senteur
Du bois emprisonnant la pluie
Et si j’étais un paysage
Je serais montagne ennuagée
Parfois mes oiseaux de passage
Feraient des trous dans mes buées
Si j’étais le choix d’une vie
Je serais mille destins hésités
Mille désirs endoloris
Mille visages envisagés
Si j’étais une part d’impossible
Je serais légère et éloignée
Si j’étais un regret terrible
Je serais des mots à effacer
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3. |
Maryline
04:20
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Maryline a 9 ans et sur le gravier de l’école
Elle court à plein élan, pour échapper au petit Paul
Qui, pour satisfaire une curiosité légitime
Cherche à soulever le mystère des dessous des copines.
Ah, un vrai aventurier, mais ici rien de bien méchant
C’est juste pour rigoler, laissez donc jouer les enfants.
Elle court elle court la petite, c’est pour mieux se faire attraper
Et court et court mon bonhomme, c’est comme ça qu’on devient un homme
Lui il l’a vu à la télé c’est comme ça qu’il faut faire
Les filles, elles font leur mijaurée mais elles aiment être embêtées
Par un emmerdeur prépubère
Ah le coquin, le chenapan, plus tard ce sera un vrai coureur
Un Roméo un don juan, qu’il est farceur
Que c’est mignon
Que c’est mignon
La jupe de Maryline, c’est pour les garçons
Maryline a 20 ans et dans le métropolitain
Elle ne sait pas comment se débarrasser de Firmin
Qui, pour satisfaire un besoin viscéral de contact
A jugé bon de laisser balader une main moite
Ah comme c’est romantique, mais il n’y a aucun danger
C’est moderne ça s’appelle la liberté d’importuner
Elle tremble, elle tremble la petite elle aurait dû mieux se couvrir
Pour ne pas tenter un jeune homme incapable de se retenir
Lui il l’a vu à la télé c’est comme ça qu’il faut faire
Les filles elles font leur mijaurée, mais elles aiment être tâtées
Par des hommes aux mains téméraires
Ah le tombeur, le passionné, lui il sait subtilement
Déceler dans des yeux apeurés le « oui » se camouflant
Que c’est touchant
Que c’est touchant
Le corps de Maryline c’est pour les garçons
Maryline a 30 ans et au domicile familial
Reçoit de ses parents un avertissement amical
Car, pendant qu’elle vit sa petite vie égocentrique,
Elle semble oublier la trotteuse de l’horloge biologique
Ah comme c’est merveilleux, couches, landau, Maxi-Cosi
Une femme véritable est une femme qui donne la vie
Et passent, passent les années, il faut trouver un géniteur
Pour cette jeune femme égarée, qui n’est plus de première fraîcheur
Eux ils l’ont vu à la télé c’est comme ça qu’il faut faire
Les filles elles font leur révoltée, mais rêvent d’un avenir étriqué
Sur un chemin héréditaire
Ah les bons, les dignes parents, ils savent donner la pression
Elle n’en veut pas ? Elle en voudra ! C’est le sens de son existence
Que c’est mignon,
Que c’est mignon,
La vie de Maryline c’est pour les biberons
Et le temps a passé, Maryline a vécu comme il se doit
Essayant tant bien que mal de dissiper tous ses « Pourquoi »
En vivant à l’étroit dans un monde de tradition
On ne peut qu’espérer en la prochaine génération
Evelyne a 9 ans et sur le gravier de l’école
Elle court à plein élan pour rattraper le petit Paul
Qui, ayant voulu renouveler les vices habituels
Se voit corriger par une coriace demoiselle
Ah une vraie déterminée mais ici rien de bien méchant
Il l’a bien mérité laissez s’éduquer les enfants
Elle court elle court la petite, rien ne pourra plus l’arrêter
Tu peux bien courir mon bonhomme, tu te feras vite rattraper
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4. |
Faites-moi pleurer
03:33
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Faites-moi pleurer
Par pitié
Ou par rire
Faites-moi ressentir
Faites-moi avouer
Les malheurs tout petits
Que j’ai là bien enfouis
Sous la paupière scellée
Faites-moi lâcher
Mes meutes d’émotions
A trop fuir le frisson
On a peur d’éprouver
Faites-moi trembler
Petits hoquètements
Des larmes s’écroulant
Enfin sur le papier
Faites s’écouler
Toute l’eau nécessaire
Pour me laver entière
A nouveau baptisée
Faites-moi chavirer
Je ne demande que ça
Presque mourir en bas
Savoir ce que c’est que couler
Faites-moi étouffer
Faites sortir de force
S’il faut briser l’écorce
Pour retrouver la peau
Faites-moi éclater
Je bous depuis longtemps
Sans me plaindre et pourtant
Pour un seul corps, c’est trop
Mais faites-moi pleurer
Avec ou sans raison
Je m’en fiche au fond
Je veux juste déborder
Faites-moi chialer
Ne soyez pas tendre
Faites-moi entendre
Que ma peine est vraie
Faites-moi souffrir
Oui je veux y passer
Parce que le fond touché
Je ne peux que revenir
Parce que le fond touché
Je ne peux que revenir
Et quand je ne serai
Qu’un petit bout de moi
Complètement submergée
Ne restez pas comme ça
Ouvrez grand vos bras
Et Consolez-moi
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5. |
Présence
04:57
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C’est camouflé derrière un rire
C’est juste là, y’a qu’à cueillir
C’est dans les branches
Un petit bonheur passager
Comme un invisible baiser
Ça tire sur la manche
C’est un espoir fort comme les vents
C’est un sourire sans rien avant
La vérité dans un silence
C’est la lumière après l’orage
Qui joue à percer les nuages
Discrète providence
C’est un miracle omniprésent
Si simple qu’on l’oublie en passant
noyé d’indifférence
C’est caché dans les petites choses
Comme une caresse quand tout explose
Une évidence
C’est un hasard qui n’en est pas
Un rendez-vous sans agenda
Un clin d’œil en avance
C’est là, juste au bord du sourire
Un amour qu’on ne peut décrire
En abondance
Un pas rassurant sur le sentier
Silencieux, marchant à côté
Une présence
C’est camouflé derrière un rire
C’est juste là, y’a qu’à cueillir
C’est dans les branches
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6. |
Ma pluie
04:26
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Ma pluie elle est une merveille,
Un concerto de gouttelettes sur le carreau,
Ma pluie, elle berce mes sommeils
Elle apaise mes nuits acides,
soulage mes respirations,
En murmurant des chansons aux mélodies liquides
Elle détache les secondes, elle s’attarde, et patiemment,
Elle prend le temps
Le temps de s’écouler
Elle prend le temps jusqu’à l’arrêter
Elle rend les dimanches calmes, à l’abri et protégés,
Elle allonge la journée, elle ralentit les promenades
Elle grisaille l’horizon, allège les ciels trop bleus
Ma pluie, c’est une consolation, ma pluie, c’est …
Comme une pause entre deux soleils, la respiration de la terre
La caresse d’une mère
Ma pluie elle invente des odeurs
Elle colore les forêts d’un parfum singulier
Elle s’allonge sur les jardins, les arbustes, les pétales,
Elle valorise l’humus, fait d’un caillou un cristal
Elle désaltère, elle verdit les feuillages,
Elle fait pleurer les saules, elle poétise les paysages
Ma pluie, elle mouille escargots limaces et grenouilles,
Elle recouvre les chemins de boue
Quand elle pleut des cordes et qu’elle flotte
Elle nous chausse de nos plus belles bottes
Pour nos balades en caoutchouc
Et dans les flaques creusées
Elle donne un sens à l’existence des petits bateaux en papier
Ma pluie, elle est ludique, elle est fous rires aquatiques,
Ma pluie, elle est mélancolique
Chorégraphe aguerrie d’un grand ballet de parapluies
Elle taquine les passants, les fuyards en sucre, les frileux
Elle joue, elle décoiffe, elle fouette les yeux
Elle s’infiltre et elle affole, elle crée des courses folles
Elle précipite, elle inquiète, et pourtant c’est rigolo
Ma pluie ce n’est que de l’eau
Ma pluie, elle délave les masques,
Elle lave les visages blessés, elle déforme les réalités
Ma pluie elle camoufle,
Nos chagrins, nos doutes
De l’eau dans de l’eau, on n’y voit goutte
J’aime quand ma pluie fait du bruit, quand elle se fait drache
Quand elle s’entête, presque elle se fâche,
Armée de vent, elle est furieuse
Elle s’acharne sur les tuiles, fougueuse
Elle déchaîne ses humeurs, quand elle s’habille de tonnerre
Elle est chef-d’œuvre, elle est grandiose
Ma pluie, elle a du caractère
Imposante, jamais méchante, ma pluie elle aime quand elle balance,
Quand elle fait des vagues, et qu’elle tangue
Quand elle nous enferme dans nos chambres,
Elle rapproche, elle réchauffe, elle câline
Elle est charmante quand à deux on la contemple,
Elle est exquise, quand elle se donne dehors
Quand elle rapproche les corps
Ma pluie, elle m’embrasse sur la joue, quand il est temps de se quitter,
Elle magnifie un baiser,
Elle me promet de revenir,
Un soir de joie ou de soupir,
Pour accompagner mes secrets,
Ma pluie se calme, sereine,
Crachin ou pluie diluvienne
Ma pluie, je l’aime
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AnneliSe Roche Lyon, France
AnneliSe Roche tisse des histoires, sur le fil, entre mots et musique, entre conte et chanson.
Elle dépeint des
portraits sensibles, de rencontres en souvenirs d'enfance, les choses de la vie, les détails touchants, évidents… indispensables, résonnant en chacun de nous.
Les amoureux de chanson sont sûrs de faire une belle découverte,
tout en émotion partagée
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