1. |
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Pour commencer, il y a l’inquiète
Celle dont la confiance s’absente
Son futur flou agrippe sa tête
Et l’anxiété dissout son ventre
Elle a si peur elle doute sans cesse
Semant des fardeaux sur sa route
L’empoisonnant dans une ivresse
Où son esprit courbé se voûte
Dans un coin il y a la rêveuse
Qui s’évade légère volatile
Elle s’invente, dessine et creuse
Dans sa tête des fables d’argiles
Elle aime à se sentir artiste
Fille du rêve et de l’espoir
Elle suit ses désirs comme une piste
Préfère l’être au verbe avoir
Au fond il y a celle qui fait mal, qui frappe poignarde brûle et griffe
Celle qui envoûte et blesse l’âme sans aucun projet ni motif
Elle est là pour nous rendre aigris, nous dire : «tu aurais dû faire ça»
Cultive regrets, mélancolie dans l’immense jardin de nos choix
Un peu plus loin c’est l’égoïste
Son petit moi dégoulinant
Qui peut jurer en bonne altruiste
Qu’à part elle rien n’est important
Écarte-toi de son chemin
Elle serait prête à te détruire
Si tu t’opposes à son destin
Qu’elle veut maitriser sans faillir
Plus proche du cœur vit l’amoureuse
Sourire naïf, visage radieux
Elle chante, elle rit presque enjôleuse
L’océan au fond de ses yeux
Son regard de fée ou de louve
Espère capturer le tien
Poussière d’iris qui la recouvre
Elle se sent nue, fragile soudain
La petite qui joue du côté d’un petit bout de mémoire ancrée
Et qui s’élance en ses fous rires c’est l’enfant qui veut pas grandir
Auprès de l’âme calme et sereine elle dort paisible, petite reine
Celle qui croit et qui espère en un roi élu et suprême
Toutes leurs voix à l’unisson m’ont soufflé cette chanson
En sachant les harmoniser
Elles façonnent mon identité
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2. |
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Au creux de mon parc, je vivais serein
Me délectant du défilé des humains
De l’anxieux travailleur, au promeneur apaisé
Du vieil homme rieur, au couple nouveau-né
Au hasard d’une balade sans destination
Je leur offre mon ombre et mes plus beaux bourgeons
J’ai l’honneur d’inspirer quelques artistes errants
Et de prêter mes branches à l’espièglerie des enfants
Un timide jour d’avril, au ciel attristé
Mon domaine de nature était déserté
Une femme vint pourtant au hasard des graviers
Se figer devant moi, nous voilà tronc à nez
Elle me contemple alors de son regard profond
De ma plus petite foliole jusqu’à la base de mon tronc
Elle me tient compagnie pendant quelques moments
Emerveillée, par l’œuvre de la nature et du temps
Pour impressionner la belle et la remercier
De l’attention délicate qu’elle prit soin de me porter
Je voulus me redresser, me faire majestueux
Me donner en spectacle en l’honneur de ses grands yeux
En bon compagnon le vent recoiffa mes ramures
Plus touffu que jamais je me fis beau de démesure
J’offrais à ma jolie mes plus belles odeurs printanières
Ainsi que le récital de tous mes oiseaux locataires
Surprise pas ce spectacle quelque peu étonnant
Et comme satisfaite de mon humble présent
La douce m’offrit alors en guise de merci
Ma sève en tremble encore, un sourire des plus exquis
Et depuis ce jour je garde bien caché
Ce moment délicieux qui a su irradier
Mon existence d’arbre uniquement bercée
Au rythme des saisons ces cent dernières années
Et dans mes nuits d’automne, dans mes rêves d’hiver
Dans chaque jour nouveau silencieusement j’espère
Si j’osais une requête, mon unique désir
Serait de recroiser la femme au divin sourire
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3. |
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Pour le fardeau de chair
Pour la douleur tortionnaire, involontaire
Pour le corps calvaire
Pour les heures fatiguées
Les nuits peu consommées
Pour la jeunesse écourtée
L’amère responsabilité
Pour l’attention réclamée
Et la patience exigée
Pardonnez-nous l’exubérance
Pardonnez-nous nos enfances
Pour les rêves négligés
Pour la passion délaissée
Pour le couple ébranlé
Les corps abandonnés
Pour les colères inattendues
Les pleurs les jours de grandes crues
Les hurlements parasites
Nos gros chagrins hypocrites
Nos gorges déployées
Vos tympans … éreintés
Pardonnez-nous l’omniprésence
Pardonnez-nous nos enfances
Pour nos genoux dans les gravats
Pour vos dépenses en sparadrap
Pour les tourments additionnés
Pour toutes nos mésaventures
Pour les Legos dans vos chaussures
Pour les joues pleines de bêtises
Et toutes nos fables naïves
Que vous écoutiez sans mépris
Pardonnez-nous l’insouciance
Pardonnez-nous nos enfances
Pour nos questions aberrantes
Pour vos réponses abondantes
Les cadeaux des fêtes des parents
Vous, bons acteurs, vous extasiant
Pour notre honnêteté sans précédent
Pour notre amour de la vie
Narguant vos manques d’espièglerie
Pour vos sacrifices en secret
Pour l’avenir à envisager
Pour l’ingratitude accumulée
Pardonnez-nous l’ignorance
Pardonnez-nous nos enfances
Pardonnez-nous nos enfances
Comme nous pardonnons-aussi
A ceux qui nous ont enfantés
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4. |
Bilan de saison
02:36
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Décembre est déjà là
Presque oubliée l’année se meurt
Entre sourires niais et douceurs
Pas le temps le droit d’être triste
Et pourtant une question résiste
Un bilan, un constat exigé :
Qu’est-ce que j’ai fait de mes journées ?
Tiens, c’est bientôt Noël
Famille, bougies, messe de minuit
Une petite touche d’hypocrisie
C’est vrai, c’est beau toutes ces couleurs
Ces visages maquillés de chaleur
De quoi oublier un instant
L’éternel recommencement
Passons les bonnes résolutions
Voilà qu’arrive comme un bourgeon
Pour dégivrer nos cœurs rigides
Un petit printemps tout timide
Réveillant nos fronts congelés
Un bilan un constat léger
Il faut que je remplisse mes journées
Tiens, ayons de l’espoir
Projets ingénieux et farouches
On a des idées plein la bouche
Merveilleuse saison d’abondance
Mais l’ambition pousse plus que la chance
On en oublie inconsciemment
Que le printemps ne dure qu’un temps
Et un jour de corps suants
S’installe un été nonchalant
Collant à notre peau suintante
Une procrastination gluante
On verra plus tard pour la gloire
Un bilan un constat reporté
Je vais reposer mes journées
Tiens, déjà les vacances
Petit programme sans prétention
Un job d’été ? Non, sans façon
Petites larves sans ardeur
Béni soit le brumisateur
En oubliant un moment
Que le temps a pris son élan
Une brise vient nous glacer les membres
C’est drôle, ça sent déjà septembre
Comme une prise de conscience tardive
Comme une peur, une piqûre vive
Un retour des soirs monotones
Et des concerts des pluies d’automne
Un bilan, un constat redouté
Il me reste si peu de journées
Tiens, la mélancolie
Le sommeil écrase les cœurs
Quand on dort, on a moins peur
Et chaque soir le petit deuil
D’une journée de plus que l’on effeuille
En essayant d’oublier,
La peur du vide qui se crée
Décembre est encore là
Presque enterrée l’année se meurt
Entre sourires niais et rancœur
Pas le temps, le droit d’être triste
Et pourtant une question résiste
Un bilan, un constat exigé
Qu’est-ce que j’ai fait de mes années ?
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5. |
Pianissimo
02:09
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Mémoire d’un homme déchu
Les mains rimant sur le clavier
Intimidées, gammes décousues
Intimidées par les années
Vieillesse fait valser ses doigts
Drôle de danse de tremblements
Et près de lui elle s’assoit
Le décourage doucement
Mais il s’en fout,
Il joue
Et ses accords tombent droits
Obéissant à d’autres lois,
Musique enlace de ses caresses
Philtre d’oubli et de jeunesse
Mais il s’en fout,
Il joue
Et le piano console ses chaînes
Vieil ami défroisse sa peine
Moment de liberté furtive
De silences en arpèges il dérive
Un homme perdu dans une gare
Trainant dix doigts désaccordés
Sur quelques touches d’accords parfaits
N’a plus grand-chose à partager
Si ce n’est cet instant pudique
D’un vieil enfant qui grelotte
Le réchauffant d’airs arythmiques
Le piano rit de toutes ses notes
Et devant nous,
Il joue
Après tout qu’est-ce que ça peut faire
Son corps peut bien vivre en hiver
Ne le regardez pas de haut
Il joue sa vie
Pianissimo
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6. |
Les plages de sel
03:57
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On aimait le vent et la mer nous aimait
On se sentait grand, on se sentait pousser
On avait le temps de peindre nos ailes
Le silence était blanc sur les plages de sel
Pas besoin d’Espagne pour bâtir nos châteaux
Juste quelques vagues pour mieux apprécier l’eau
L’âge de sucre et des seaux à la pelle
C’était nous sur les plages de sel
Demain n’était encore qu’un jour de la semaine
Guettés par les yeux verts d’un chat en porcelaine
On fuyait les corvées, on parlait au pluriel
La terre s’arrête ici, sur les plages de sel
Les jeux et les histoires sentaient si bon l’embrun
Nos corps de biscuits s’égratignaient en câlins
Je crois ne jamais avoir avoué l’amour réel
Que j’éprouvais pour vous et nos plages de sel
Je veux vous retrouver beaux et aventuriers
Redonnez-moi mes robes mes joues toutes salées
L’histoire d’une mer sucrée qui a goût du soleil
Les contes de maman sur les plages de sel
Vous me manquez tellement dans ce parfait tableau
Et si le temps jaunit, comme sur les photos
Oublions nos cœurs grandis et nos querelles
Le silence n’attend pas sur les plages de sel
On aimait le vent et la mer nous aimait
On se sentait grand, on se sentait pousser
On prenait le temps de peindre nos ailes
Allez venez, je vous ramène sur nos plages de sel
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AnneliSe Roche Lyon, France
AnneliSe Roche tisse des histoires, sur le fil, entre mots et musique, entre conte et chanson.
Elle dépeint des
portraits sensibles, de rencontres en souvenirs d'enfance, les choses de la vie, les détails touchants, évidents… indispensables, résonnant en chacun de nous.
Les amoureux de chanson sont sûrs de faire une belle découverte,
tout en émotion partagée
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